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Un bon jour pour mourir ( A Good Day To Die ) – 1973 – 222 pages – Collection 10-18 n° 1988Ah Jim Harrison !
Il n’y a rien à faire, cet auteur vous tient et ne vous lâche plus dès que vous ouvrez l’un de ses livres !
Comme à chaque fois les images que « montrent » les mots de l’écrivain SONT les U.S.A. « profonds », l’Amérique des petites villes, des saloons, des bars, des « diners », des motels et des pompes à essence à l’ancienne mais aussi et surtout sans doute, celle de la nature sauvage et superbe, des paysages à couper le souffle, des lacs, des rivières, des sierras, des kilomètres de routes dans les déserts, les montagnes, à travers les états … Et puis il y a le rythme de l’écriture aussi, un rythme qui fait que les lignes écrites deviennent cousines des sillons d’un bon vieux disque en vinyl de rock ou de country posé sur une platine antédiluvienne...
Jim sait « écrire » les images qu’il veut faire passer et son talent nous pousse à lui pardonner les écarts de langage qui sont parfois sa marque et que j’ai déjà évoqués.
Avec ce roman que je viens de lire en quelques heures pluvieuses tant il m’a passionné, il nous lance une fois de plus dans un périple déjanté à travers les States en compagnie d’un trio improbable, le narrateur dont on ne cite pas le nom, Tim un ancien du Vietnam complètement accroc à tout et le premier amour du même Tim, Sylvia, convoitée évidemment par le narrateur … Les trois personnages sont bourrés à un tas de saloperies et à l'alcool qui les font planer pendant tout le périple, ce qui débouche fatalement sur des situations incroyables et un projet complètement dingue …
Mais c’est surtout un « road book », comme un « road movie », qui embarque le lecteur depuis les keys de Floride pour l’emmener après un long voyage, un tas de péripéties, d’anecdotes, de descriptions précises de la nature ambiante jusqu’en Idaho où l’histoire se termine en drame avec cette image qui rappelle la fin du film d’Antonioni de 1970, Zabriskie Point ( sur une musique du Dead et de Pink Floyd ). Il y aussi beaucoup ici aussi de Point limite zéro
( Vanishing Point ) de 1971, ce film qui montre le périple fou d’un chauffeur qui a fait le pari de ramener une voiture de Denver à San Francisco en un temps record et qui est informé sur les mouvement de la police à ses trousses tout au long de la route via la radio par un disc-jockey noir aveugle …
On peut penser aussi à On The Road ( Sur la route ) de Kerouac mais nous avons ici un texte structuré et de la patte si particulière de Jim Harrison. Tout au long des pages on évoque un nombre incalculable de personnages, de lieux, Dylan, le Dead, Merle Haggard, le Grand Canyon, Yellowstone, Chief Joseph des Nez Percés, les Mandans, les Oglalas, les Cheyennes …
Comme toujours, le texte de Jim ( qui écrit, je l’ai déjà mentionné, comme on parle et sans aucun préambule à tout changement de situation ) déborde de petites histoires, de phrases courtes, incisives qui font pourtant à chaque fois le tour de la question abordée. C’est un drame qu’il nous raconte mais on rit quand même beaucoup, comme de coutume. Et on est bien en Amérique, celle des portes moustiquaires, des bars country, de la poussière, des cactus, des voitures et de la musique. Des hippies aussi parce que le roman est situé dans les années soixante.
Le titre fait référence à un proverbe en usage chez les Nez Percés de Chief Joseph https://fr.wikipedia.org/wiki/Chef_Joseph ... Rappelons-nous à propos de cette phrase de cet autre film culte Little Big Horn et Dustin Hoffman …
Pour ce qui me concerne, Jim Harrison doit sans doute être avec James Ellroy et l'un ou l'autre, le plus grand écrivain américain contemporain. J’en suis convaincu.
J’ai acheté d’autres livres du grand homme ce week-end, j’y reviendrai après lecture.