Raymond Chandler et Philip Marlowe

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Guy Bonnardeaux
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Raymond Chandler et Philip Marlowe

Message par Guy Bonnardeaux »

Raymond Chandler et Phillip Marlowe !

Deux noms associés à une série de 7 romans noirs qui auront marqué le genre d’une empreinte indélébile.

Comme beaucoup le pensent, et à juste titre, Dashiell Hammett avait établi des codes, mis en place une rythmique ( sur fond de jazz ? ) de l’écriture de roman policier, nette et sans fioriture. Avec des phrases choc et cette technique qu’il affectionnait de pousser son héros, dès le premier paragraphe d’un récit, en situation, dans l’action, sans préambule.

Raymond Chandler de son côté a créé un style imparable de narration et réalisé une œuvre qui, on le sait, influencera bien des auteurs par la suite.

L’écrivain prend son lecteur par la main et ne le lâche plus, il le glisse dans les pas de son héros, le détective privé Philip Marlowe, tout au long des péripéties que doit vivre cet homme pour résoudre une ou de plusieurs enquêtes imbriquées parfois les unes dans les autres.

Avec, chez Chandler, l’obsession de faire de la littérature à part entière. La constante recherche d’une écriture de style. L’auteur voulait être reconnu comme écrivain serviteur d’une littérature de qualité et non voir ses romans uniquement catégorisés comme de simples histoires policières comme les autres. Ce qu’elles ne sont d’ailleurs pas.

Chandler fut aussi auteur de nouvelles, il en publia onze dans Black Mask notamment dans les années 30.

Il fut encore scénariste à Hollywood mais pas uniquement dans le cadre d’adaptations de ses romans. D’autres créations jalonnent son parcours dans le monde du cinéma. Comme Double Indemnity réalisé par Billy Wilder et qui met en scène Fred McMurray, Barbara Stanwyck et Edward G. Robinson ( 1944 ) ou The Blue Dahlia dirigé par George Marshall avec Alan Ladd, Veronica Lake et William Bendix. Hitchcock a aussi travaillé avec Raymond… D’autres choses aussi dans le monde d’Hollywood avec bien évidemment, les adaptations de ses romans « Philip Marlowe ».

D’Humphrey Bogart à Elliot Gould en passant par Robert Mitchum ou James Caan, ils sont nombreux à avoir assuré le rôle. Avec des réussites diverses.

Je viens de lire ( relire pour certains ) les 7 romans dans leur édition révisée puisque, comme beaucoup le savent, les traductions parues dans la mythique Série noire n’étaient pas toujours complètes. En effet, les volumes de la série étant techniquement limités à 254 pages, certains romans étaient trop longs pour correspondre à ce cadre et les traducteurs/adaptateurs ont parfois dû couper dans les récits. Un peu comme on le faisait chez Marabout dans les débuts…

Gallimard ont rectifié cet ennui en réunissant ces histoires dans une édition Quarto Gallimard de près de 1300 pages que j’ai achetée à la FNAC. Ces pages sont accompagnées d’un gros dossier bien illustré consacré à la vie et l’œuvre de Chandler
( 1888 – 1959 ).

http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLI ... ip-Marlowe
( détail amusant, sur la couverture, le personnage fait penser à l'acteur Richard Widmark )

Pour rappel, les 7 romans sont :

The Big SleepLe Grand Sommeil – 1939
Traduction Boris Vian.

Farewell My LovelyAdieu, Ma Jolie – 1940
Traduction Geneviève de Genevraye, revu par Marcel Duhamel et Renée Vavasseur, révisé par Cyril Laumonier.

The High Window – La Grande Fenêtre – 1942
Traduction de Renée Vavasseur et Marcel Duhamel, révisé par Cyril Laumonier.

The Lady In The Lake – La Dame du Lac – 1943
Traduction de Boris et Michèle Vian.

The Little Sister – La Petite Sœur – 1949
Traduction de Simone Jacquemont et J.-G. Marquet, révisé par Cyril Laumonier.

The Long Goodbye – Sur un Air de Navaja – 1953
Traduit puis augmenté par Janine Hérisson et Henri Robillot, révisé par Cyril Laumonier.

Playback – Charades pour Ecroulés – 1958
Traduction de Chantal Wourgaft, révisé par Cyril Laumonier.

A noter qu’à l’époque de sa sortie chez nous, l’éditeur avait, à la grande stupéfaction et incompréhension de l’auteur ( et on le comprend ) donné le titre de Fais pas ta Rosière à The Little Sister… On peut s’étonner aussi de ceux réservés à The Long Goodbye et à Playback.

Peut-être, estimait-on que ces mots étaient plus vendeurs ?

Ce qui est fascinant chez Chandler, c’est que le lecteur ne s’ennuie jamais à le lire. Je ferai une exception pour le dernier
( Playback ) qui m’a moins tenu en haleine que les autres et m’a semblé – mais c’est une opinion personnelle – moins abouti.

Les chapitres de tous les romans sont courts et donc les récits concis, pas une phrase en trop, pas un mot superflu. De l’humour aussi et des petites phrases bien tournées de la bouche de Marlowe et dont l’auteur était coutumier.

Philip Marlowe, ancien flic, devenu détective privé à L.A. est avant tout un type honnête, ce n’est pas un aventurier à la petite semaine pour qui le moindre dollar est bon à prendre. Au contraire, s’il accepte une affaire, il la mène à terme, ses prix sont normaux quand il perçoit son argent car il le refuse s’il estime ne pas avoir été à la hauteur de la tâche et des résultats attendus.

Et il doit parfois débrouiller des affaires bien confuses, notre ami Marlowe. Quelqu’un lui propose un travail - souvent retrouver une personne disparue – et tout part en vrille. Il y a toujours une embrouille quelque part et on n’a pas toujours tout dit dès le départ au détective qui se retrouve souvent dans des situations plus que difficiles.

Evidemment, le lecteur a droit à une galerie incroyablement longue de personnages de tout acabit. Flics mal aimés, grognons, sérieux ou incapables ou véreux parfois, gangsters dangereux ou occasionnellement loyaux, starlettes hollywoodiennes, larbins de tout style, jardinier japonais, medium, Indien bizarre, drogués de tout poil, alcolos par dizaines, géant incontrôlable juste sorti de taule, bellâtres, femmes fatales et bien d’autres intervenants décrits avec talent…

Marlowe n’est pas à l’abri des coups montés, des arnaques, des coups de matraque, des passages à tabac, de se voir drogué de force et retenu dans un asile pour cinglés…

Tout se passe à L.A., à portée du Pacifique, Hollywood et les environs, Sunset Boulevard, Laurel Canyon, Topanga Canyon, Cahuenga Pass, Bervely Hills, Pasadena, Ventura Boulevard, Encino, Sherman Oaks, Bay City, Crestview, Sepulveda, Mullholland Drive ( là où résidera plus tard le Harry Bosch de Michael Connelly ),..

A noter que dans ses livres, Chandler fait peu référence à la guerre pourtant contemporaine de certains romans sauf dans La Dame du Lac en 1943 où il mentionne les postes de surveillance qu’il y avait sur la côte dans la crainte de voir arriver des sous-marins japonais.

Au fond, Chandler c’est l’écrivain cinéma par excellence. Quand on le lit on voit un film. On voit les costumes, les robes, les bijoux, les vamps, les galures des hommes, les bagnoles, grosses cylindrées qui n’en finissent plus et croisent sur les boulevards, descendent les canyons. Les Diners minables et les palaces de luxe, les rats d’hôtels, les bureaux grand genre ou ceux, sinistres comme celui de Marlowe, dont les persiennes tirent des lignes d’ombre sur le mobilier...

Je les aime tous ( sauf Playback, un peu moins comme je l’écrivais ) mais mon favori est The Long Goodbye

Bonne lecture…

En parlant d'influence, notre ami Michel avait bien raison, à propos de l'excellent Philip Kerr, voir son post ici : viewtopic.php?f=44&t=4482

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