Four dead in OHIO

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cachi
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Four dead in OHIO

Message par cachi »

Une BD implacable sur la répression aux USA pendant la guerre au Vietnam. Y a t-il vraiment de quelque chose qui a changée?

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Roman graphique
Kent State de Derf Backderf
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Éditions çà et là, 287 pages – 23 Euros

Le 4 mai 1970, 4 étudiants, âgés de 19 à 20 ans sont tués et 9 neuf autres gravement blessés sur le campus de Kent State (Ohio). Ils sont tués, à l’arme lourde, par les fusils d’assaut M1 des soldats de la garde nationale. Le lendemain, des millions d’étudiants se mettent en grève et c’est le début de la fin de la guerre du Vietnam et de l’ère Nixon.
Depuis Lauren Canyon, en Californie, Neil Young avec ses compères Crosby, Stills and Nash, composent, dès le 5 mai, « Ohio » l’hymne des militants anti-guerre :
“Tin soldiers and Nixon's coming.
We're finally on our own
This summer I hear the drumming
Four dead in Ohio”

https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q ... L5kmiq6KGb

50 ans après les événements tragiques de la manifestation de Kent State, l’auteur américain Derf Backder f livre le récit historique magistral et poignant qui conduira à la mort de Allison Krause, 19 ans, William Schroeder, 19 ans Jeffrey Miller, 20 ans et Sandra Schauer, 20 ans.

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Plongée dans les États-Unis de la fin des années 1960

Plus qu’un roman graphique, Derf Backderf réalise ici un magistral documentaire historique sur les années 1960-70, la contestation contre la guerre du Vietnam et la société américaine de l’époque. La BD s’ouvre d’ailleurs sur une grève de camionneurs de l’Ohio en 1969 brisée par l’armée sous les yeux angoissés de Derf, enfant et de sa mère. Plus que Berkeley ou Oakland, l’université de Kent State est révélatrice de l’explosion universitaire aux USA. Ex petit campus, niché dans une bourgade agricole, blanche et conservatrice, le nombre d’étudiants à Kent State a été multiplié par dix en dix ans. Alors que le centre-ville reste républicain et « petit-blanc », le campus bigarré est gagné par toutes les tendances de la gauche américaine de l’époque (« Student for a Democratic Society », « Black Panthers », « Yippies », « Weather Men »). Le portrait du « Che » trône dans toutes les chambres étudiantes en concurrence avec les posters des groupes rock californien. Le maire républicain de la ville est violemment hostile aux jeunes tandis que le gouvernement de l’État n’y voit que de la racaille communiste qui a réussi à interrompre le meeting de Nixon en ville. On découvre avec effarement le dispositif de répression de l’époque (vérifié et quantifié par des sources officielles). La police du Campus de Kent qui n’opère que sur le campus compte 23 membres, la police du Shérif et du Comté compte 1075 agents, la police municipale patrouille surtout en dehors, le FBI infiltre largement le campus en concurrence avec le Renseignement Militaire tandis que l’armée entretient le ROTC (Corps d’entrainement des Officiers de Réserve) sur les campus américains et à Kent en particulier et l’armée (Garde Nationale). Police et armée partout, avez-vous dit ? Réaction et incompétences surtout qui débouche sur une véritable boucherie.

Plongée dans la vie des étudiant(e)s et des futures victimes.

Pour les autorités gouvernementales et locales, les étudiants contestataires qui s’opposaient à la guerre du Vietnam étaient forcément guidés depuis l’étranger, et à ce titre, méritaient une répression des plus féroces. Nixon, en poste en 1970, était un féroce anti-communiste, adepte de toutes les manipulations et mensonges possibles, alors que les étudiants, dans leur grande majorité, comprenaient mal les divergences qui secouaient le mouvement anti-guerre (divergences attisées par les centaines d’agents infiltrés du FBI) mais comprenaient très bien que cette guerre allait les concerner très vite, surtout après l’invasion du Cambodge le 29 avril 1970. En brossant le portrait des étudiant(e)s qui allaient succombés aux balles de la Garde nationale, l’auteur brosse le portrait d’une génération, plus ou moins engagée mais solidaire. La bonne idée scénaristique a été de remonter à l’origine des faits qui ont débouché sur la tragédie, avec un compte à rebours au millimètre dans les deux camps.

Un trait expressif et convaincant
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Backderf nous avait habitué à un trait expressif pour ces ouvrages précédents mais, dans le cadre de ce drame, il gagne encore en réalisme et sait marquer les pauses documentaires au bon moment avant de replonger dans l’émotion la plus totale en noir et blanc. Le massacre de l’université de Kent State en 1970, donne l’occasion à Derf Backderf de livrer sa bande dessinée la plus engagée en fustigeant un oncle Sam aux mains pleines de sang…


S.C

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